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TiRrOiRs d'AbSuRdisTaN

Lundi 11 novembre 2013 à 17:20

 Août 2009. Au cours d'un road-train-walk trip en Europe.


Fafreluche et Kro, son équipière de voyage, décident de quitter Sofia. Elles s'accordent en cœur pour se rendre à Sarajevo. Les deux acolytes préparent comme il se doit leur prochaine nuit dans le train. Elle grimpe dans le cracheur de vapeur avec bière et un mélange vodka-pomme. Elle sont ravies de quitter Sofia et bien décider à fêter cela. Seules dans une cabine, elles trinquent en riant les premières quelques heures.

Vers 23h, le train s'arrête. Des hommes montent avec des chiens. Contrôle routinier des douanes. Ils entrent dans la cabine des deux filles et leur demandent : « PACHAPORTE ! »

Les emmerdes commencent. L'une d'elle n'a pas de passeport. Elles tentent une négociation dont on ne rapportera pas les propos pour cause de relans de vodka-pomme. Les douaniers sont intransigeants : pour entrer en Serbie, il faut un passeport ! Ils sortent les deux excitées du train, sous les yeux des autres passagers accoudés aux fenêtres. Clandestines, pensent-elles, on est des clandestines ! Elles ruminent tout fort.

Il fait nuit noire. Elles traversent entre les douaniers l'espèce de terrain vague jusqu'au poste des douanes. Sans silence aucun et avec un arrêt pipi dissimulé par un stratagème improvisé sur l'instant. Mais c'est là que commence leur fierté d'ado attardées : « on a pissé sur le poste des douanes haha ! ». Après un bref interrogatoire au poste, un « gentil » flic leur explique qu'elles ne peuvent pas rester en Serbie. Qu'il va donc devoir les reconduire à la frontière. Les deux bougonnent sec, le voyage devient super compliqué si elles ne peuvent traverser la Serbie pour regagner la France. Ça fait un sacré détour... le douanier, quitte une seconde le bureau afin de prévenir ses collègues de la tournure des choses.

C'est alors que Fafreluche le voit. Trônant sur le bureau. L'éclat de l'écusson la démange, que déjà elle l'empoigne et le jette à Kro qui, à ce moment-là sortait une réserve de vodka-pomme de son sac. Tout se passe très vite, Kro enfourne le képi dans son sac pendant que Fafreluche retourne à sa place. Les deux, entre un demi-sourire et deux clins d’œil, reprennent leurs apitoiements comme si de rien n'était.

Cinq minutes plus tard, tassées à l'arrière de la bagnole des douaniers, elles se demandent bien où on les emmènent. Frontière routière. Les flics passent le premier barrage et les laisse en riant entre les deux postes de douanes. Un petit no man's land. Les deux sortent de la voiture et finissent par prendre un fou rire en voyant où elles ont atterri. Que faire, maintenant ? Si tout est aussi absurde, jouons le jeu jusqu'au bout se disent-elles ! Elles déterminent le trottoir liseré blanc et rouge pour passer la nuit. Pendant la nuit, elles seront frôlées par des cars de touristes qui les regarderont comme...

 

Lundi 11 novembre 2013 à 13:48

 Ce fut une époque sombre. Ou plutôt post-sombre. Le père de la soeur de coeur de Fafreluche, quelques jours après un Noyeux festin de Joël en famille, a voulu faire l'amour à sa femme. Celle-ci fort éprouvée, refusa. C'est alors que contre toute attente, le père de la soeur de coeur de Fafreluche avoua que coups de quequette il donnait à une autre que sa femme depuis... Il venait de perdre sa maman, elle-même perdue bien avant sa mort dans le bien connu trouble de perte de mémoire presque totale. Ce père de famille semblait aspiré dans l'accomplissement d'une seconde enfance. 

La mort provoque coups de quequette.

Plus tard, la mère de Fafreluche perdit son père. Alors que Fafreluche venait visiter Mère en deuil. Celle-ci dit à Fille qui arrivait de l'autre bout de l'Europe après quelques mois d'absence: "J'aurais préféré ne pas te voir". 

La mort provoque crachats de lama.

Un jour Fafreluche vit son amour partir. Entre gré et force, rejoindre son île africaine. Alors Fafreluche s'est trouvée dans l'attente. Elle attendait ce coup de fil où on lui annoncerait: " S. s'est fait arrêter par la police, S. a été renvoyé en Anjouan". Alors Fafreluche, saurait que S. embarquerait sur un kwassakwassa à travers l'Océan indien afin de rejoindre les bidonvilles de Mamoudzou. Seulement Fafreluche est allée à la piscine une fois avec S. et Fafreluche a vu que S. ne sait pas nager. 
Fafreluche a pensé que ce jour-là, elle ne voudrait pas se donner la mort. Mais qu'elle redeviendrait bien une enfant. Non, elle reviendrait même avant, dans un ventre chaud d'où on ne voit encore rien du monde. Ou même encore avant, avant de pomper au cordon, avant tout cela. Au stade où elle n'était même pas encore idée de quelconques géniteurs. 

La mort provoque regrets d'avant-le-cordon.

Dimanche 10 novembre 2013 à 20:56

Au pays de la tradition du bal, Fafreluche s'en est allée pour la première fois au bal. Elle s'était procurée robe, chaussures à talon, et un petit attirail d'ustensiles appropriés. A l'heure convenue, elle s'est rendue à l'endroit convenu au bras d'un cavalier convenu. 
Elle a dansé, bu, mangé, bu et dansé. A minuit, Fafreluche, cavalier and cie sortirent sous la neige attendre le carosse-taxi. Fafreluche était épuisée et excitée de cette soirée en tout et pour tout très autrichienne. Elle s'engagea dans un dialogue de sourd avec la taxi-woman roumaine. 
le trajet fut rapide. 
Arrivée à sa porte, Fafreluche se rendit compte qu'elle avait perdu... SA ROBE!



Dimanche 10 novembre 2013 à 20:18

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Dimanche 10 novembre 2013 à 17:48

 « Il a toqué à ma pendule. Hum, peut-être il y a maintenant six ans ou plus, je ne sais plus vraiment. Il est entré dans ma chambre par la fenêtre comme à son habitude. L'air penaud, les yeux presque rieurs d'efficacité. Il était là et tout était en marche. C'était la première fois.

Il n'a rien dit. Je n'ai rien dit. Nous savions. Sans savoir. Tout était en marche.

C'était pour l'oncle. Il est parti, un pied pourri, grimper les racines. Quelle idée.. nos yeux se disaient. Il ne verra jamais le pissenlit, lui ! Ah, non, seulement la pelle. Et le petit prince s'est assis au coin du lit. Son écharpe verte, flottante sans vent. Il sentait la rose des marécages. Il avait ce parfum impossible de l'échappée souhaitée et condamnée. Ses mèches bouclées, belles et si revêches. Il fixait, entre tendresse et devoir. Au delà de mon front.

Je me souviens de lui comme si c'était maintenant. De ce baluchon tout à coup lourd comme le plomb. A gravir. Une sierra sans fin, une butte solaire d'un dieu. Et lui, dans ses yeux, on savait qu'il n'avait pas de dieu. Il donne envie de larmer jaune, le petit prince. Si près de ton souffle, il t'écoute. Il est là tout le temps. Il happe dans la mémoire des terres tous tes souffles. En messager des boues. J'ai hoqueté. L'oncle, au pied inerte depuis 10 jours, j'ai hoqueté. Alors le petit prince s'est arrêté et il a lâché le baluchon. Le ciel devait être sanglant de sa fin ou noir d'absence, ou d'un pâle de renaissance. Dans ses yeux, c'est tout ça à la fois. Un arc-en-ciel confondu : la tu-meurs de la boue ! Il a souri de ses lèvres basses et vers sa pelle ses mains sont allées. Des mains d'hommes sur ce corps adolescent. Calleuses et sèches d'avoir trop pratiqué terre, pierre et rêve. Et il a accompli cet enfoncement de ferraille dans le sol, sa levée qui éjecte sa prise. Il a remué. Jusqu'au trou. Des heures, des minutes, des jour, des secondes, des mois.. accordé au sablier-tien. Et comme à chaque fois il a jeté la pelle, les mains rouges de sang. Les yeux hagards et violacés il a déversé le baluchon. Dans le trou. Et il s'est écroulé sur la pierre des hauteurs. Bras et jambes abandonnés, de dos, face à l'infini. En étoile de mer. Séchée sur terre.

Pour pêcher, il faut une canne, un ver -et pas n'importe lequel!- un bon hameçon, une berge, de l'eau avec du poisson -vaut mieux!- et attendre. Il crame un bout de fil de pêche avec son mégot. Son vieux mégot de roulé qu'il traîne dans sa bouche depuis le matin. Le fil crame pas, il sort le mégot. Ah, cela aussi fait partie du matériel ! Le mégot ! Un trou dans sa bouche, la lèvre est inclinée en mini-demie-lune. Où il remet le mégot. Cette bouche où le mégot habite en tout droit désormais. Puis il ouvre sa bouteille en plastique de rosée. Pose sa canne. Et s'assoie plus loin, dans l'herbe grasse d'ombre. Sa femme, déjà hagarde. Le regard sournois, méchant. Enfin, on lui laisse pas le temps, on court et on joue de rien avec le petit frère. Lui qui a les yeux si rieurs. Une innocence incarnée, auquel on volerait une proximité du monde. Ces yeux plissés d'amusement, ce bonheur à contempler. On joue, sur la berge. Esquivant de la vue le rosé dans le plastique-volvic, le mégot si bien à sa place, ces corps meurtris. C'est 11h.

L'histoire nous dira qu'ils ont abandonné. Voilà leur mort lente. Leur nage coulante dans les marres de plastiques rosées. Au soleil, au bord de leur terne ravière liquide, leur ivre sans paix. Ils roupillaient à la quête de la tombe-oublie. Desséchés et suintants. Cent années, sans jour, sans moi.

C'est 11h. Rien ne mort à l'hameçon ; et ça ne mordra que tard. Quelques années suffiront. Le petit prince arrachera ces plaies et les balancera du bout du baluchon. Sans retrouvailles, sans lien, seuls. Le petit prince est à son œuvre, baluchon et gravier gravi. Il met dans les trous frais de sa pelle. Et les mèches folles et mortelles il repart, tout contre le souffle diminué du monde.

Et s’éclipse. Un appel de terre froid sous les pieds.

Je l'ai cherché. Porté disparu. Mais comme tout disparu, il n'est pas réapparu.

Seulement il y a quelques mois. C'était le 31 mars.

Sur ma fenêtre. » Fafreluche

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